Le jardin régulier du château de Jallerange se distingue en tant que l’un des rares témoins des jardins comtois de la fin du XVIIIe siècle, ayant gardé toute son originalité. L’arrivée au château est mise en scène depuis le portail en demi-lune, l’avant-cour et la cour d’honneur. A gauche de la première cour, le bâtiment héberge, dans une imposante cave voutée, deux superbes pressoirs, témoins du passé viticole du domaine. Sur le flanc Sud de la demeure, on aperçoit les frondaisons du jardin en position dominante. Le visiteur accède au jardin latéralement par une rampe ou par l’escalier de l’ancienne cuverie.
L’accès privé passe par le salon situé à l’étage du corps de logis, dont l’extrémité communique avec un élégant péristyle. De là, la composition résolument régulière se structure autour d’un axe principal qui traverse le parterre de gazon, le vertugadin (surface concave bordée de glacis) et se termine au niveau du bosquet des tilleuls. Le parterre est divisé en quatre compartiments qui s’organisent autour d’un bassin aux proportions savamment définies. Il est bordé à ses extrémités par deux salles de fraîcheur composées de tilleuls, conduits en marquise, qui se prolongent par de hautes palissades de charmilles accompagnant une longue perspective montante : celle-ci est dite « accélérée » par le jeu des tailles de la charmille, en dégradé progressif, donnant l’illusion d’un jardin plus grand qu’il n’y paraît. A gauche de ce parterre, une allée conduit à la « salle des noyers » attenant au petit « bosquet du cœur » ; à droite, la même allée mène à la statue de Flore. Des vases d’Anduze occupés par des lauriers roses et des orangers font partie de la décoration.
A partir du parterre, deux rampes encadrent le vertugadin, dont le glacis est ponctué de deux ornements en pierre blanche constituant un repère d’échelle ; elles conduisent au pied du grand tapis vert qui se présente en pente et tient un rôle déterminant dans l’approche visuelle de la composition à la façon d’une scène de théâtre. Deux contre-allées bordent le tapis-vert. A mi-parcours, l’ascension est coupée par une allée transversale : cet axe secondaire conduit, d’une part, à un cabinet de verdure à faces octogonales concaves, orné d’une grille qui permet de bénéficier d’une vue sur la vallée de l’Ognon et, de l’autre vers la « salle des marronniers » où trône la statue de Bacchus (mutilée). Les grands compartiments, générés par l’intersection des allées, sont aujourd’hui en gazon, alors que, par le passé, ils étaient plantés de vignes et vergers. Le rond-point de l’intersection, occupé par la statue du Joueur de flûte, est signalé par de grands charmes taillés en pain de sucre qui contribuent aussi à relancer la perspective.
Au-delà du tapis vert, la marche aboutit à la salle des huit tilleuls, mise en scène par un petit fer à cheval. Le petit parc paysager se découvre par étape en empruntant son allée de ceinture. La composition, plus pittoresque, met en scène la nature et quelques arbres remarquables (sophora pleureur, cytise...). Dans un des bosquets prend place une glacière parfaitement conservée. La déambulation, après avoir traversé le rond-point de la statue de Flore surplombant le potager, revient sur le jardin régulier.
Texte d'Emmanuel Parisot 2021